L’écrivain de science-fiction Norman Spinrad avait eu ce bon mot concernant son genre littéraire et l’éternel débat d’y classer certaines œuvres ou non :
« La SF, c’est tout ce qui se publie sous l’étiquette SF ».
Aujourd’hui, dans le monde de la publication en France, il est amusant de constater que, pour paraphraser Spinrad, le roman c’est tout ce qui se publie sous l’étiquette roman. Ainsi du nouveau « roman » de Nathalie Azoulai, Python (2024), en fait un récit autobiographique (mais peut-être quelque peu romancé ?), qui décrit les efforts de l’autrice pour s’immerger dans la culture des codeurs. Mais j’arrête là mes jérémiades sur les étiquettes, ça n’a finalement que peu d’importance.
Nathalie Azoulai est une autrice dont j’ai entendu beaucoup de bien, mais que je n’avais jusqu’ici encore pas lue. Erreur réparée donc, avec ce Python. Nathalie Azoulai a cette qualité, plutôt rare il me semble chez les écrivains hors SF, de considérer que les sciences et les techniques représentent une part essentielle de la culture humaine, et que par conséquent elles méritent d’être sujet littéraire. (Houellebecq, notamment, me semble partager cette perspective.)
Le livre d’Azoulai est divertissant, on la suit amusé dans sa quête des jeunes (et moins jeunes) geeks qui vont l’instruire, ce qui va nous amener en même temps quelques intéressants repères historiques. Python, c’est donc un langage de programmation, par ailleurs fort prisé par les bioinformaticiens. Un de mes passages préférés du livre, c’est lorsque Azoulai retrouve la trace du créateur de Python (Guido van Rossum), installé en Californie, et qu’elle débute un échange de courriels avec cet homme, qui se trouve être intelligent, humble et passionnant.
Ceci dit, après 120 et quelques pages, le livre s’essouffle et peine à tenir le rythme. L’autrice développe une nouvelle trame plus personnelle concernant un de ses proches – peut-être des lecteurs trouveront là un développement poignant, mais j’ai été plutôt laissé au bord de la route… Cela tient peut-être à l’approche ; on est là dans un genre qui pourrait être un long article de magazine, donc difficile à tenir sur la longueur d’un court roman. Peut-être, aussi, le livre souffre-t-il d’un manque de profondeur. Certes, il y a de bons passages, des réflexions pertinentes, mais au final on reste quand même plutôt en surface, en tous les cas à cent coudées de ce que des auteurs comme par exemple Justin Smith-Ruiu ou André Ourednik peuvent produire sur le sujet.
Mais ne boudons pas notre plaisir, c’était une bonne lecture, et je suis curieux de lire Azoulai dans ses écrits pour le coup véritablement romanesques.
- Python, de Nathalie Azoulai, 2024, P.O.L., 240 pages.