Donald Trump et Kamala Harris en course pour la présidence américaine. Dessin de Patrick Chappatte pour le Spiegel.
Here we go again : Les élections américaines se tiennent mardi prochain, 5 novembre. Troisième élection d’affilée figurant l’inénarrable Donald Trump. S’il l’emporte, il sera seulement le second président des États-Unis à accomplir deux mandats non consécutifs, après Grover Cleveland, comme je l’ai appris par hasard aux Grosses Têtes de Laurent Ruquier (émission culturelle !).
Après le choc surprise de 2016, puis la référendum anti-Trump de 2020, il me semble qu’une forme de fatigue s’est installée, du moins chez certains. Si Trump est élu, pensent-ils, on survivra comme on a survécu le premier mandat. Si Harris est élue, tant mieux, mais les attentes ne sont guère hautes. Cela ne veut pas dire qu’il n’y aura pas d’éclats, quel que soit le résultat. Après tout, on parle d’une élection avec le candidat qui a incité la foule à envahir le Capitole, et qui a réchappé à deux (!) tentatives d’assassinat dans la course actuelle à la présidence.
Après la mise au rancart de Joe Biden, les Démocrates se sont décidés pour une candidate, Kamala Harris, qui a été une femme invisible durant son mandat de vice-présidente. Cet été, elle a réussi, malgré cette image terne, à générer de l’enthousiasme pour sa campagne, et à gagner en stature. De cet enthousiasme initial, je ne sais trop bien ce qu’il reste aujourd’hui. Harris apparaît comme une politicienne capable, mais rouée et sans grande personnalité. Modelée par les élites du parti, et prête à mener une politique politicienne. Bref, tout ce que les partisans de Donald Trump, et sans doute beaucoup d’électeurs indécis, ont en horreur.
Quant à Donald Trump, tout a déjà été dit. Aucun scandale, aucune peur ne pourrait désormais le faire reculer – il est sans vergogne, sans filtre, hors normes. Il court les podcasts. C’est un homme qui révulse, mais qui fascine, et qu’on ne peut pas accuser de lâcheté. Il n’est pas soutenu par la majorité du peuple américain (plutôt par un tiers ou un peu moins de la moitié), toutefois, compte tenu du système électoral qui donne une importance démesurée aux états, il n’a pas besoin d’être le candidat le plus populaire pour être élu à la Maison Blanche.
Qui l’emportera la semaine prochaine ? Vraiment aucune idée. Espérons seulement que le peuple américain garde la tête froide, quelle que soit l’issue.
[Edit 4 novembre : je lis avec effroi dans le Guardian que Trump, s’il est élu, envisage de mettre Robert F. Kennedy Jr. en charge de la santé publique et de la sécurité alimentaire. Et pourquoi pas Bernie Madoff comme secrétaire au Trésor, pendant qu’on y est ? ]
[Edit 5 novembre : dans son éditorial du dimanche dans la Sonntagszeitung, Arthur Rutishauer, toujours équanime et modéré, note :
L’apocalypse ne viendra pas, tout comme elle n’est pas venue sous les présidences du duo Biden/Harris ou sous celle de Trump. Trump n’est pas un fasciste, ni Harris une communiste. Et la démocratie américaine et ses institutions sont de toute façon bien plus fortes que ces deux-là. S’il y a un pari à prendre, c’est que le monde continuera de tourner après le 5 novembre.]