Très fier qu’une de mes nouvelles de fantastique figure au sommaire de l’anthologie annuelle des éditions Malpertuis – la seizième de la série, pas moins, toujours dirigée par Thomas Bauduret, et judicieusement nommée Malpertuis XVI. D’autant plus honoré que l’éditeur a annoncé que cette anthologie serait la dernière de la série !… Malheureusement le marché des recueils de nouvelles, de fantastique ou autre, n’est pas glorieux, et cette décision économique des éditeurs ne surprendra pas, même si c’est dommage. Tout de même, bravo à eux d’avoir maintenant le cap durant dix-sept années, un gigantesque effort ! Et la fin de l’anthologie ne signifie pas la fin des éditions, qui continueront de publier des ouvrages de fantastique.
J’avais déjà eu le plaisir de voir un de mes textes (le fond du tonneau) paraître dans une antho Malpertuis – c’était Malpertuis IV, ça remonte déjà… Le nouveau texte, publié en septembre, s’intitule ZAP, et raconte comment une manifestation surnaturelle perturbe la quiétude d’un petit village. Pensez à Dôme, de Stephen King, mais dans un bled du canton de Vaud plutôt que dans une petite ville du Maine.
Ça se veut léger et – on l’espère – amusant. À découvrir en exclu dans l’anthologie Malpertuis XVI ! Extraits :
Le mur était invisible, indestructible, et s’élevait en hauteur sans limite apparente. On avait essayé de creuser dessous, mais le passage sous terre était aussi infranchissable qu’en surface. Le mur s’arrêtait précisément aux limites du village, à l’est et à l’ouest.
« Et mon Fendt quasi neuf, qui va payer les dégâts ? » a demandé Gillard.
« Et qui a construit ce satané mur ? » a ajouté René, que j’avais vu au bistrot ce matin, travaillant dur à rattraper son apéro manqué de la veille.
« C’est les écolos, c’est signé ! a dit Sandra, la tenancière de l’auberge. On commence par se coller les mains à la route, et après on construit des murs invisibles ! »
Un autre a lancé que c’était un coup de Poutine. Un troisième penchait pour les extra-terrestres. Tout le monde s’y est mis, on ne s’entendait plus. Le syndic s’est dressé, tapant du plat de la main sur la table jusqu’à obtenir un peu de calme. Il a dit que les gendarmes allaient venir le jour même, qu’on y verrait plus clair.
La fête continuait, les tables étaient toutes occupées et on buvait des coups de blancs. Rabey, installé derrière le podium, a ouvert la partie officielle. Il allait passer la parole à son ami le président de la caisse de pension, quand on a vu les Zapistes arriver par la route du bas, une trentaine, le bichon ouvrant la marche, et derrière lui la châtelaine. La voix de Rabey est sortie amplifiée des haut-parleurs :
« Ah, la fête est complète. Bienvenue à tous au 1er août officiel de Plantuy. Venez prendre un verre. »
Mais les visages n’étaient pas festifs du côté des Zapistes, et personne chez nous n’osait dire un mot. Je n’avais encore jamais vu la châtelaine comme ça : le visage cramoisi, la mâchoire serrée, les yeux écarquillés. Même le bichon prenait des airs de pitbull.

- Malpertuis XVI, anthologie dirigée par Thomas Bauduret, 2025, éditions Malpertuis, 358 pages.