Ce dimanche 9 juin, en Suisse, nous votons sur l’initiative populaire « Pour la liberté et l’intégrité physique ». Cette initiative, lancée par Richard Koller, est également connue sous le nom de « Stopp Impfpflicht » (Stop à la vaccination obligatoire). Elle est promue par les sceptiques du vaccin contre le covid et vise à inscrire dans la constitution helvétique une sorte de garde-fou empêchant toute contrainte à la vaccination. La Suisse n’oblige personne à se vacciner (covid ou autre), et les Suisses n’ayant pas tempérament à changer brusquement d’avis sur ce genre de sujet, le status quo sur la question est garanti. Le changement constitutionnel est donc inutile. Cette initiative en devance une autre, celle dite « Pour une protection efficace des droits constitutionnels (initiative pour la souveraineté) » lancée par le Francis Lalanne suisse, Nicolas Rimoldi. Ce dernier est le fer de lance du mouvement Mass-Voll en Suisse alémanique (traduit en français par la coupe est pleine), mouvement opposé aux mesures sanitaires durant la pandémie, et qui soutient d’ailleurs également l’initiative Stopp Impfpflicht. Dans le viseur de cette initiative pour la souveraineté, on trouve notamment des organisations internationales comme l’Organisation mondiale de la Santé, qui « prend en étau la Suisse », d’après les initiants – on retrouve bien là l’éternelle paranoïa des mouvements antivax envers l’OMS. Il va sans dire que je trouve la multiplication de ces initiatives aberrante, une perte de temps, et une perte d’argent (surtout pour le contribuable, qui finance les coûts des votations).
Samedi dernier, le 1er juin, se retrouvait pour manifester à Genève toute une brochette suisse et internationale de vaccino-sceptiques. La cible de leur colère ? L’OMS, encore elle, qui discutait pour l’occasion un nouveau traité sur les pandémies. Comme nous l’apprend le journal Le Temps, on retrouve parmi les contradicteurs en Suisse le mouvement Mass-Voll, et Nicolas Rimoldi était annoncé parmi les intervenants à cette manifestation sobrement intitulée « La route de Genève – le convoi du peuple ». L’article prête même à Rimoldi cette hallucinante citation :
« Avec son traité pandémique et le [Règlement sanitaire international], l’OMS veut déterminer la politique sanitaire à suivre. Elle veut nous imposer ses vérités. Ce n’est pas acceptable. Comme l’a lui-même souligné l’ex-conseiller fédéral Ueli Maurer lors d’une manifestation des Amis de la Constitution en Argovie, il n’y a de fait pas eu de pandémie. Je milite personnellement pour une abolition de l’organisation qui est devenue très autocratique. »
Et moi qui croyais que nous avions vécu une pandémie en 2020-2022 ! Quel benêt je suis. Tout au plus une épidémie étendue, mais c’est peut-être encore exagéré. Et si ça vient d’Ueli Maurer, on peut lui faire confiance.
Il n’y avait pas que du beau linge suisse, des « sommités » américaines étaient aussi de la partie à Genève ce début juin. Celles-ci sont au mieux controversées, au pire tout bonnement discréditées dans les milieux scientifiques et au-delà : Robert Malone, Bret Weinstein, ou encore Steve Kirsch. L’internationale du complotisme se porte bien, et a même le vent en poupe.
Pendant ce temps à Vera Cruz… Pendant ce temps à Washington, Tony Fauci, le visage scientifique de la réponse au coronavirus aux États-Unis, désormais 83 ans est retraité du gouvernement, est sur le gril pour répondre aux questions du sous-comité du congrès américain chargé d’enquêter sur la pandémie de coronavirus. Il y aurait beaucoup à discuter, maintenant que nous avons le recul nécessaire. Toutes les décisions n’étaient pas bonnes à prendre, mais souvent l’information qui aurait permis de choisir une meilleure option n’était pas disponible. Ceci dit, il est clair pour moi que les États-Unis sont allés trop loin dans par exemple la fermeture des écoles. Ainsi, on peut avec raison débattre des choix faits durant la pandémie, et critiquer ces choix, si besoin est. Las, ce qui s’est passé à Washington tient plus du cirque de foire, comme le note parfaitement David Pakman dans son émission. Et en clowns rageurs, nous avons Marjorie Taylor Greene, la fangirl de Donald Trump qui se rêve en vice-présidente, Jim Jordan, le fauteur de troubles, et quelques autres, qui brassent de l’air et balancent des invectives (MTG à Fauci : « Votre place est en prison ! »). Ces gens ne sont pas sérieux.
[Mise à jour du 10 juin 2024:
Sans surprise, le peuple suisse a rejeté l’initiative “Pour la liberté et l’intégrité physique” (Stopp Impfpflicht) par une large majorité de 73.7 % de la population, et un refus de tous les cantons. Sans surprise également, le refus par les tenants de l’initiative de tirer quelque leçon que ce soit de cette débâcle. Richard Koller parle déjà de relancer l’initiative, tandis que Mass-Voll y voit un “mandat pour lutter encore davantage pour les droits constitutionnels”. Pas sérieux, on vous disait. ]